Echebrune et son passé
Notre commune est un livre d’histoire à ciel ouvert. Encore faut-il l’écrire !
Voici quelques grandes lignes chronologiques qui ont marqué Echebrune, en y laissant des traces. Nous essayons de les mettre en contexte et espérons les développer avec l’aide de personnes intéressées.
L’ère secondaire, il y a 100 à 65 millions d’années
Nos territoires étaient recouverts par la mer qui en se retirant nous a laissé, par sédimentation, notre terre calcaire de Petite Champagne et sur les hauteurs une quantité de fossiles de créatures marines, en particulier les ammonites. Nous les trouvons partout dans les vignobles et dans nos jardins, il serait intéressant de les identifier et d’en savoir plus.
La pré- et proto-histoire, du Néolithique à l’Âge de Fer (de -6000 ans jusqu’à notre ère) :
A Malabri, sur les hauteurs à l’ouest du bourg d’Echebrune, un tumulus et un monument mégalithique indiquent une sépulture, datation incertaine. L’endroit est protégé par les Bâtiments de France.
A l’est, au lieu-dit La Combe des Vaux, des fouilles ont mis à jour des objets datant de l’Age de Bronze et du premier Âge de Fer.
L’ère gallo-romaine (de 50 av J.-C. à 450 ap J.-C.) et le haut Moyen Age jusqu’à l’an 1000
Nous n’avons pas connaissance de vestiges gallo-romains dans la commune. Mais une importante occupation est certaine dans toute la Saintonge. Notre Font des Prats, dite « fontaine gallo-romaine », était sans doute connue et exploitée à cette époque. Nous savons que la culture de vignes a été introduite dans la Gaule par les Romains.
Origine du nom
Le nom « Echebrune » est très ancien. Deux hypothèses : une origine germanique asken-brunnen (Eschenbrunnen en allemand moderne) :« la source aux frênes ». Des documents signalent des occupations étrangères dans des villages gallo-romains. Des garnisons de Wisigoths ou de Francs, donc germanophones, se seraient installées avec leurs familles dans notre région à partir du 5ème siècle. Ceci pourrait expliquer une origine allemande du nom. Bien sûr des frênes et des sources ne manquent pas dans le secteur.
Nous penchons plutôt pour la deuxième hypothèse, une origine latine. Un relief accidenté et escarpé est caractéristique du bourg d’Echebrune. Le verbe latin « scabere» : « gratter » ou « raper » a donné lieu à un adjectif « scaber », au féminin « scabra » signifiant « rapeux » ou « rugueux ». D’où l’adjectif francais « scabreux ». Le dictionnaire Littré donne comme exemple « un terrain scabreux » qui serait inégal ou rugueux.
Différentes versions du nom figurent dans des documents des 13ème et 14ème siècles : Eschabrones, Chabrones, Echabrones, Eschabrunis, Chabronis. La voyelle « a » est un indice important. Par la suite l’orthographe était « Eschebrune » jusqu’au 19ème siècle avant d’être modernisée en « Echebrune », l’accent aigu sur le premier E remplaçant « Es ».
On peut tout à fait postuler et expliquer la dérivation du nom Echebrune d’une origine latine « scabronis » ou « scabrunis ». En tout cas nous sommes loin ici de l’hypothèse germanique.
Les 11ème et 12ème siècles, la « renaissance » médiévale
Nous ne savons rien d’une église primitive ou d’un prieuré qui aurait existé avant notre église romane. Mais des fouilles archéologiques récentes (en 2015 et en octobre 2021) ont révélé des structures médiévales estimées au 11ème siècle à l’est de l’église et des possibles traces de bâtiments accolés à l’église du côté nord. L’ancien cimetière devait s’étendre à l’ouest et au nord, des sépultures médiévales ont été découvertes. Des cuves et sarcophages monolithes utilisés maintenant comme jardinières près de l’église et dans le quartier datent de cette époque.
Les 11ème et 12ème siècles ont connu un grand éveil culturel et spirituel, la façade ouest de notre église témoigne de la fin de cette époque. Il serait intéressant d’en savoir plus sur l’esprit du temps, les artistes et artisans bâtisseurs, le passage des pèlerins sur le Chemin de St Jacques (on dit qu’un chemin secondaire passait par Echebrune et Biron). Des recherches seraient à faire également sur le symbolisme des figures sculptées. Ainsi qu’un recensement des graffiti sur la façade et les murs extérieurs de la nef.
Les guerres du Moyen Âge, la Guerre de Cent Ans (1337-1453), les reconstructions
Ces guerres ont fait des ravages autour de Pons. La Saintonge ayant une situation frontalière avec l’Aquitaine elle est passée et repassée entre les mains des Français et les Anglais. Cédée aux Anglais avec l’Aunis après le Traité de Brétigny en 1360, elle a été reprise par les Français (Bertrand du Guesclin) en 1372. Ensuite la situation s’est apaisée jusqu’à la fin du 14ème siècle.
Au début du 15ème siècle la situation s’est dégradée. Cette période était particulièrement anarchique (conflits entre seigneurs, massacres, pillages et destructions en tout genre, les campagnes dévastées). C’est vraisemblablement à ce moment que l’église d’Echebrune, située à un endroit stratégique, a subi la destruction de son chœur et son abside. Son emplacement très accidenté a pu provoquer des glissements de terrain aggravant l’effondrement de cette partie du monument.
La reconstruction de l’église a succédé dans le courant du 15ème siècle, on peut supposer après la bataille de Castillon en 1453 et la fin des hostilités. D’abord les énormes contreforts nécessaires pour consolider la tour centrale ont permis d’élever et d’appuyer le haut chœur gothique. L’édification du clocher est venue terminer le bâtiment, symbole d’une période apaisée.
La Renaissance; les Guerres de Religion
C’est au 16ème siècle que le chœur de l’église a été élargi au sud par un grand transept carré, dit de style Renaissance. D’autres remaniements sont intervenus par la suite, chaque époque souhaitant laisser sa marque. Des gravures anciennes nous surprennent. On voit que le pignon triangulaire de la façade romane a été transformé, probablement au 16ème siècle, par un haut fronton arrondi avec un clocheton de chaque côté. Pour nous cela semble incongru et disgracieux, alourdissant l’ensemble. (Heureusement la forme triangulaire d’origine a été restaurée après 1904).
C’est pendant les Guerres de Religion (deuxième moitié du 16ème siècle) que les voûtes de la nef romane ont été détruites, remplacées par le plafond en bois (tillage) que nous voyons aujourd’hui.
Le Château d’Usson
Ailleurs dans la commune, la Renaissance a connu des jours plus heureux. Le Château d’Usson, construit de 1536 à 1548, a marqué l’histoire de notre commune bien qu’il n’y soit plus. Edifiée par la famille Rabaine, cette imposante demeure de style Renaissance italienne possède une grande tour arrondie, une belle galerie à arcades et une ornementation sculptée riche et raffinée. Cette architecture est clairement inspirée par le décor flamboyant de l’église de Lonzac à quelques kilomètres à l’est, construite de 1515 à 1530. Il est possible que les mêmes artisans aient travaillé sur les deux édifices.
(Sauvé de la destruction à la fin du 19ème siècle, le château a été démonté et reconstruit pierre par pierre au sud de Pons par l’entrepreneur William Augereau. Considérablement remanié, le monument passe de main en main au 20ème siècle, gardant le nom « Château d’Usson ». Finalement il reprend vie en 1999 sous forme d’un parc à thèmes nommé « Château des Enigmes ». Actuellement il ne reste à l’ancien emplacement du château que le Logis d’Usson, propriété viticole, avec un corps de bâtiment du 18ème siècle et une jolie tour au toit pointu récemment reconstruite).
Vers les temps modernes (19ème et 20ème siècles)
Anciennement fief du Château d’Usson, c’est sous Napoléon, en vertu de la loi du 17 février 1800 sur l’organisation administrative de la France, que nos villages sont constitués en commune. Le Code Civil, promulgué en 1804, permet aux métayers et travailleurs de devenir propriétaires de terrains et de maisons. A partir de là, Meussac, Le Puy Haut et Figers se développent. De belles demeures bourgeoises avec toit d’ardoises voient le jour dans la deuxième moitié du 19ème siècle, notamment le Château du Puy Haut construit en 1882. Une importante communauté protestante est présente dans ces trois villages mais le pouvoir administratif reste au bourg d’Echebrune près de l’église catholique.
Le phylloxéra
Pendant le Deuxième Empire (à partir de 1852) la culture de la vigne s’est fortement développée grâce aux exportations du cognac. Une belle prospérité jusqu’à la crise du phylloxéra qui a frappé la France à partir des années 1860.
L’insecte porteur de la maladie est venu avec l’importation de cépages américains largement adoptés à l’époque, sans doute pour favoriser la quantité et la productivité. Ce petit parasite a fait des ravages. En Charente Maritime le canton de Pons a été le premier touché, dès 1868. Les coteaux d’Echebrune en premier lieu sans doute. En peu de temps la totalité du vignoble a été détruite. Les conséquences économiques étaient désastreuses, des viticulteurs ruinés ont délaissé leurs terres.
Après l’exode, les arrivages d’ailleurs. De nombreux habitants d’Echebrune parlent de racines vendéennes, d’aïeux venus de Vendée occuper des propriétés abandonnées ou les acheter à bas prix. L’environnement de vignes était transformé en pâturages, les habitudes de vie étaient bouleversées pour une trentaine d’années. En tout cas, l’histoire d’Echebrune est profondément marquée par cet évènement majeur.
Histoire du temple protestant
Pourquoi un temple protestant dans le petit village du Puy Haut? Un phénomène rare. Nous savons que la communauté protestante était bien ancrée à Meussac, au Puy Haut et à Figers. Mais de là à construire un temple …
C’est le résultat d’un mouvement d’évangélisation mené depuis Pons à partir de 1895 par le pasteur Benjamin Robert et son épouse. Cette Oeuvre de Propagande Evangélique de Pons devait consolider l’implantation de l’Eglise Réformée dans nos campagnes et développer des actions éducatives et sociales.
Le pasteur Robert achète l’emplacement au Puy Haut pour 200 francs le 31 octobre 1897. (Il s’agit d’un bâtiment et terrain appartenant à Monsieur Ludovic Gruget, héritier de Madame Angélique Cornette). La première pierre du temple est posée le 17 mars 1898. On note qu’à ce moment-là le maire d’Echebrune, Emile Laroche, est lui-même protestant.
Le temple est construit « avec les ressources fournies par les contributions volontaires de fidèles et les souscriptions de leurs frères des Eglises protestantes de France ». Ensuite, le 12 juin 1904, Monsieur et Madame Robert en font donation au Conseil Presbytéral de Pons.
Il est intéressant de noter que la loi de 1905 sur la Séparation de l’Eglise et de l’Etat assure la « liberté de conscience » et l’autonomie des cultes, les prêtres et pasteurs n’étant plus salariés de l’état. L’église dite Réformée (protestante) devient indépendante et peut se développer en levant les finances nécessaires. Le Pasteur Robert a toute liberté pour concrétiser sa mission au Puy Haut.
(En activité jusqu’en 1952, le temple désaffecté au culte et le terrain sont vendus à la commune d’Echebrune pour un prix de 300.000 anciens francs. Par acte préfectoral du 17 septembre 1952, l’achat est déclaré d’utilité publique, le bâtiment devant servir comme Salle des Fêtes et Foyer Rural. Il ne pourra, en aucun cas, être utilisé pour un office religieux. Il a servi pour des activités culturelles avant d’être remanié en atelier provisoire pour des artisans locaux et ensuite en local technique pour la commune.)
(Détail intéressant concernant la cloche : nous lisons dans nos archives que le 27 novembre 1982 le Conseil Municipal a donné son accord pour céder la cloche à la communauté protestante, pour installation dans le temple de Cozes. Le 26 mai 1983 un nouveau Conseil Municipal est revenu sur cette décision. La cloche resterait en place « afin qu’il n’y ait pas de polémique dans ce village ».)
La « mini-révolution »
Dans les premières années du 20ème siècle la vie municipale de la commune commence à bouger. Un épisode très particulier a marqué l’histoire d’Echebrune, l’enchaînement et la chronologie des évènements restent à éclaircir. Nous attendons d’en savoir plus.
Au début du 20ème siècle le temple protestant a déjà pris place au Puy Haut à côté de Meussac. Son clocher pointu est bien visible depuis l’église catholique (qui s’empresse de reconstruire son propre clocher !) Les deux clochers se font face, les communautés se regardent de loin et, dans certains cas, d’un mauvais œil.
Une donation par un « généreux donateur » offre une « maison école » à Meussac (le bâtiment de l’école et de la mairie actuelles). Par la suite, l’école et la mairie qui étaient au bourg d’Echebrune sont transférées à Meussac. Le bourg d’Echebrune perd le pouvoir administratif, la commune est divisée.
La tension monte, des habitants viennent brûler des registres à la mairie de Meussac, on se bagarre avec des fourches, on peut parler d’une « mini-révolution » qui a marqué la commune pendant des décennies.
Gare d’Echebrune
Un chemin de fer suivait la route qui est devenue la D700 actuelle. Inauguré en 1895 il reliait Barbezieux-Archiac-Pons, en passant par Lonzac et Jarnac Champagne.. La gare d’Echebrune se trouvait à l’emplacement actuel de l’arrêt des bus. Prochain arrêt, « gare » de Biron, une simple halte située au carrefour au sud de Figers. Ensuite, halte à Bougneau avant d’arriver en gare de Pons. Le train (appelé localement « le tacot » ou le tramway) y circulait encore dans les années 1930. Il roulait à 20-30 km/heure et avait souvent des problèmes (déraillements, pannes, retards ou accidents). Les anciens disaient que dans les montées les voyageurs étaient obligés de descendre!
La partie de la D700 passant par le bourg d’Echebrune s’appelle encore Rue de la Gare. On remarque un ancien commerce en face de la gare, avec une façade en bois qui affiche « Epicerie », « Mercerie » « Vins et Liqueurs ». Il serait intéressant d’en savoir plus. C’est la seule enseigne de commerce encore visible dans la commune.
La guerre de 1939-1945. Chute de la « Forteresse Volante »
Sans connaître les bombardements infligés (par erreur) au village voisin de Jarnac Champagne, Echebrune est passé tout près du raid gigantesque des forces Alliées du 31 décembre 1943. Le livre très intéressant de Christian Genet, Jacques Leroux et Bernard Ballanger « Les deux Charentes sous les bombes » raconte la chute de la « Forteresse Volante » américaine qui s’écrase ce jour-là sur la route entre Figers et Meussac.
Parti de Bury St Edmunds en Angleterre, ce Boeing B-17G-1-BO nommé Pacific Dream participe à la mission 171 de la 8e US Air Force pour bombarder les installations allemandes dans le sud-ouest de la France. C’est une véritable armada aérienne de B17 et de B24 qui a pour objectif la base de Cognac Châteaubernard le 31 décembre 1943.
Ayant largué ses bombes, le Pacific Dream est gravement touché par la défense aérienne allemande et prend feu. A 12h20 les 8 membres d’équipage sautent en parachute pour atterrir à différents endroits près de Pons. L’avion en perdition tourne au-dessus de Meussac, continue sa dérive vers Figers et s’écrase sur la route D144 à l’endroit que nous connaissons grâce à la stèle « Borne de la Liberté ». Des débris sont projetés loin le long de la route et dans les vignes.
Six aviateurs réussissent à s’évader, les deux autres sont faits prisonniers. L’un d’eux, Reuben Fier, a vécu une aventure extraordinaire à la suite de son atterrissage au nord de Pons. Il est revenu sur les lieux en décembre 1981. Un témoin de la chute de l’avion, habitant de Figers, lui a remis une pale de l’hélice qu’il avait récupérée dans les vignes.
(Pour la petite histoire : on dit qu’au moment de la chute de l’avion, une chèvre à Figers est devenue folle!)
Le samedi 10 septembre 1994 marque le Cinquantenaire de la Libération de Pons. C’est un grand moment de commémoration pour la ville et ses environs. Dans l’après-midi un impressionnant « Convoi de la Liberté » de véhicules militaires passe par Clion et Marignac pour rejoindre une cérémonie à Figers à 18 heures. La « Borne de la Liberté » est inaugurée, de nombreux Echebrunois se souviennent bien de cette grande occasion.
Souvenirs de la vie d’autrefois
Voici un sujet qui passionne les Echebrunois. C’est dans le cadre de la Vie Associative que nous souhaitons le développer, avec les personnes intéressées. Nous comptons sur leur mémoire, leurs connaissances, des images et documents en tout genre, pour de bons moments d’évocation et de partage.